BOTANIQUE par Renée
Confinement
pour le Covid 19, j’ai tout mon temps pour trouver dans mon jardin la
cochenille du kermès, connue depuis l’Antiquité pour son pouvoir colorant
donnant la couleur écarlate aux laines, soies, cuirs.
Le
chêne kermès (ou « à kermès » comme un des professeurs de la faculté
de sciences de Marseille nous demandait de le nommer) ne manque pas dans ce
coin de colline ! Il y repousse dès le printemps s’il a été coupé, ou bien
il y grandit à l’abri des viornes tin pour semer ses glands.
Il
appartient à la famille des fagacées. Je n’ai jamais vu ici cette fameuse
cochenille qui fit la richesse du Sud de la France, mais seulement quelques
gales rouges, sans valeur...
Gales rouges Photo insecte.org |
Pourtant
à la société botanique de Marseille, la Linnéenne, ce professeur dont je viens
de parler nous l’avait montrée : une petite boule rouge brun, bleutée,
recouverte d’une fine poussière blanche, collée à un petit rameau de kermès. On
aurait dit une prunelle bien mûre, sans pédoncule !
Cette
présentation regroupa tous les présents et fût l’occasion d’un cours mémorable.
Je comprends, vu sa rareté, l’intérêt qu’elle suscita !
Kermès Ilicis |
Kermès Ilicis
Ce
serait en réalité la larve femelle du kermès accrochée en mars sur le chêne qui,
après copulation en avril avec son mâle qui lui est ailé et se déplace,
prendrait une forme sphérique et formerait en mourant un bouclier à ses œufs.
Et
c’est en mai que les femmes au petit jour, à l’aide des deux ongles qu’elles
gardaient longs pour cela, cueillaient ces petites boules qu’il fallait passer
à la vapeur pour tuer les insectes, puis les faire sécher pour les réduire en
poudre.
Les
marchés florissants du kermès étaient Montpellier, Marseille et Venise pour le
kermès oriental.
Un
peu d’historique : Pour les Phéniciens le « Kermès » c'est le ver. Dans la
Bible, en hébreu c’est le tola schani (ver rouge). Pour les Italiens c’est le
kermès vermilio.
En
Phénicie, ce serait des bergers qui auraient découvert son pouvoir colorant en
remarquant des taches écarlates sur la toison de leurs moutons lorsqu’ils
traversaient des garrigues.
Chez
nous, on dit qu’au mois de mai, sur les pigeonniers, ce serait les fientes
rouges des pigeons qui seraient le point de départ de la découverte, ou de la
redécouverte de cette teinture.
C’est
par l’utilisation des pesticides sur les vignes plantées sur des terrains
proches de chênes à kermès que cette cochenille aurait été décimée. Elle a été
moins résistante que les cochenilles qui s’attaquent à mes plantes d’ornement !
Mais les grecs et les Romains qui l’ont utilisée, parce qu’elle était moins chère que la pourpre l’ont prise pour un produit végétal et cela a perduré des siècles jusqu’en 1551 où son origine animale a été identifiée mais cela n’a pas convaincu tout le monde.
1204, une Charte : « l’étranger ne peut teindre à Montpellier aucun drap de laine avec la graine du petit houx ».
1666, Plumier donne à St Domingue l’origine animale de la cochenille.
On parle d’un pari sur son origine végétale ou animale, en 1725, qui aurait été tranché par des juristes !
D’autres cochenilles ont été utilisées celle du scléranthus dite cochenille de Pologne ou celle de l’opuntia, voir plus loin.
Enfin en 1729, dans « histoire naturelle de la cochenille » Melchior de Ruscher, un Hollandais, affirme que c’est un insecte et Linné en 1756 lui donne son nom scientifique et la classe dans les hémiptères. Ouf !
Sur le livre « les insectes » par Louis Figuier de 1875 prêté par un de mes amis, j’ai pu lire que le kermès fut concurrencé par une autre cochenille celle de l’Opuntia, cactus appelé Mopal, ce qui donnera le nom de Mopaleries à ces fermes Mexicaines où l’emploi d’esclaves, la rendait moins chère.
En 1858, A.W.Hofmann découvre le rouge d’aniline.
1880, l’élevage de la cochenille ne se fait plus à grande échelle, il ne sert plus qu’à la préparation de colorants non toxiques pour les confiseurs et ceci encore de nos jours, du moins on l’espère.
1880, l’élevage de la cochenille ne se fait plus à grande échelle, il ne sert plus qu’à la préparation de colorants non toxiques pour les confiseurs et ceci encore de nos jours, du moins on l’espère.
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